Quand la folie gagne le monde, réfléchissons et posons nous les bonnes questions. Aujourd’hui, je vous conseille « Le capitalisme expliqué à ma petite fille » de Jean Ziegler. Ce dernier a occupé durant 8 ans, le poste de rapporteur spécial auprès de l’ONU sur les questions du droit à l’alimentation dans le monde. Il a été confronté à l’extrême pauvreté et a pu étudier le rôle des multinationales.
» Entre 1992 et 2002, en dix ans seulement, le produit mondial brut a doublé et le volume du commerce mondial à été multiplié par trois. Quant à la consommation d’énergie, elle double en moyenne tous les quatre ans.
Depuis le début de ce millénaire, pour la première fois de son histoire, l’humanité jouit d’une abondance de biens. La planète croule sous les richesses. Les biens disponibles dépassent de très loin les besoins incompressibles des êtres humains »
Aux origines du capitalisme
Jean Ziegler, dans ce court ouvrage de 114 pages, exprime sa vision du capitalisme et nous explique pourquoi ce système devrait disparaître. Avec une écriture claire et concise, l’auteur revient sur les origines du capitalisme. Dans un simulacre d’échange (ce que je n’apprécie pas tellement dans cette collection), il nous fait nous poser les bonnes questions. Comment en est-on arrivé à ce qu’une minorité de la population détienne la majorité des richesses du monde? Comment les premiers capitaux ont-il pu se constituer? La révolution française joue un grand rôle dans le développement de la pensée de la propriété privée. L’esclavage, quant à lui, se révélera déterminant dans la constitution du capital.
Parler capitalisme, c’est comprendre les théories économiques sous-jacentes et les différents courants de pensée. Ziegler revient sur l’ouvrage « Du capital » de Karl Marx, mais également sur les théories d’Adam Smith. L’auteur rend la pensée économique limpide en définissant les concepts dont nous avons tous entendu parler, mais qui nous semblent souvent abscons.
La dénonciations des limites du capitalisme
Oui, le capitalisme a du sang sur les mains. Non, le ruissellement des richesses n’existe pas. Non, le capitalisme n’est pas un système qui promeut l’égalité. Voici, en quelques mots, une partie de la pensée de l’auteur.
Aujourd’hui, le capitalisme s’est établi dans le monde entier sous la houlette des multinationales. Grâce à son poste de rapporteur à l’ONU, Jean Ziegler appuie son argumentaire sur les exemples concrets qu’il a pu étudier. Il s’est rendu dans différents sièges de multinationales (notamment Nestlé) et s’est déplacé dans de nombreux pays pour constater, par lui-même, les problèmes d’accès à la nourriture. Il dénonce, entre autres, les inégalités, le travail des enfants et la complicité des gouvernements de ces pays. Sans faire la morale à son lecteur, il nous sensibilise sur notre consommation qui induit des conditions de vie et de travail misérables et mortellement dangereuses pour beaucoup d’êtres humains. A la question naïve de sa petite fille sur le pouvoir d’opposition des états, Jean Ziegler ne peut que constater leur impuissance face aux multinationales. Sur ce thème du pouvoir, l’auteur nous parle de la dette, moyen efficace pour maintenir des pays dans la pauvreté .
» – D’après tout ce que tu m’as dit et tout ce que j’ai compris, les capitalistes ni la sécurité de tous les êtres humains, ni la sécurité pour chacun.
-Ce n’est, en effet, pas leur problème. La justice sociale, la fraternité, la complémentarité entre les êtres, la liberté? Le lien universel entre les peuples, l’intérêt général, le bien public, l’ordre librement accepté, la loi qui libère, les volontés disparates transfigurées par la règle commune? De vieille lunes, des rêveries archaïques qui font ricaner les jeunes et efficaces managers des sociétés transcontinentale privées !
Ceux-ci ont une autre mission. Le principe fondateur du système capitaliste, c’est le profit. C’est la concurrence impitoyable entre tous les individus et tous les peuples. La logique du capital est fondée sur l’affrontement, sur l’écrasement du faible, sur la guerre. Et il faut ajouter que le capitalisme tire de la guerre un inépuisable profit par la destruction, la reconstruction le commerce des armes.
Et demain ?
Selon Jean Ziegler, le système, créant de trop grandes inégalités, ne peut être réformé. Pour autant, l’auteur ne prône pas le remplacement du capitalisme par un système déjà existant . Ce serait une facilité intellectuelle de penser que les anticapitalistes sont tous des communistes. Dans ce livre, Ziegler ne nous indique pas de pistes de réflexion sur une nouvelle économie. C’est notre rôle de lecteur de lire d’autres ouvrages, d’autres auteurs qui eux, proposent un autre système.
Jean Ziegler nous propose une réflexion sur le capitalisme limpide et concise. Tous les citoyens devraient le lire pour réfléchir au système dans lequel nous vivons. L’auteur nous apporte des pistes de réflexions à creuser avec d’autres ouvrages et d’autres penseurs.